2024 a été une année particulièrement infernale pour moi, pourtant, cela ne m’a pas empêché de jouer à un très grand nombre de jeux vidéo ou d’œuvres qui pourraient y être associés. Au total c’est un peu plus d’une trentaine de jeux que j’ai finis, tous plus ou moins sortis au cours de l’année. Cette année a été une année d’exploration bien au-delà des jeux vidéo qui sortent sur les plateformes typiques de marché comme Steam. En effet, j’ai passé beaucoup de temps à explorer notamment les sélections faites pour des festivals spécifiques et indépendants comme A MAZE et d’autres.
En somme, il ressort de cela que j’ai joué à beaucoup d’expériences particulièrement variées allant du Walking Simulator aux fraises jusqu’au blockbuster ayant coûté plusieurs centaines de millions, toutes monnaies confondues.
Contrairement à l’exercice habituel, j’ai essayé cette fois de réunir des expériences qui n’apparaissent pas forcément ailleurs dans d’autres listes, soit parce qu’elles sont obscures, soit parce qu’elles ne sont pas sorties en 2024, soit juste parce qu’elles sortent complètement des radars. C’est aussi un bon prétexte pour recommencer à publier sur ce carnet que j’affectionne tant, avant les gros sujets qui vont également vite arriver.
Bonne lecture ! ■
esteban grine, 2025.
Endless Monday: Dreams and Deadlines, hcnone, 2023
J’ai joué au jeu dans une période particulièrement tendue professionnellement parlant (entre emploi salarié et fin de thèse). Voir les problèmes professionnels des personnages du jeu m’a également permis de gérer les miens et d’envisager la suite. Dans l’une des fins, la personnage principale se fait licencier et décide de monter sa propre entreprise, bien que cela ne soit pas ma propre situation, cela permet malgré tout de se projeter dans un futur peut-être un peu plus souhaitable. Relativement court (environ 3h), il m’a suffi de rajouter une petite heure pour atteindre la meilleure des fins et pour quelqu’un qui a vécu deux burnouts en une seule année, cela valait éminemment le coup.
Undertale Yellow, Master Sword & Team Undertale Yellow, 2023
Undertale Yellow est un fangame, développé par la Team Yellow, qui se positionne comme étant un antépisode d’Undertale. Le jeu reprend les éléments du lore originel pour proposer à son audience de révéler l’histoire de Clover, supposé·e être l’âme jaune dans Undertale. Malgré ses pics de difficultés, le jeu propose une expérience dans la continuité du jeu de Toby Fox. On y retrouve les mêmes variations de registres d’une séquence à une autre. Cela peut déstabiliser dans une certaine mesure, comme lorsque le récit enchaîne et révèle l’histoire de Kanako, fille de Chujin et Ceroba Ketsukane. La transition faisant de Ceroba l’antagoniste finale est d’ailleurs particulièrement étrange : on ne voit pas la chose arriver. Dans une certaine mesure, tout en sachant que Clover va d’une façon ou d’une autre mourir ou « rendre l’âme » à la fin de l’expérience, celle-ci se trouve tout de même brutale. On aurait pu espérer un autre dénouement. Le statut de prequel, associé à Undertale Yellow, fait aussi que son récit ne trouve pas une conclusion aussi satisfaisante que pour Undertale.
Dans tous les cas, il est important de remarquer le jeu pour ce qu’il est aussi en tant qu’objet médiatique. Il s’agit d’un des premiers fangames annoncés (en 2016, le concernant) et voir enfin le jeu fini est dans une certaine mesure une prouesse qui n’est possible que par le dévouement de la communauté Undertale en ligne. La controverse autour de la musique du jeu et du gestionnaire des ayants droit, Materia, est aussi un cas d’école dans ce qui concerne les UGC et leur vie dans l’industrie du jeu vidéo.
Titanic 2: Orchestra for Dying at Sea, Flan Falacci, 2023
Jeu sans queue ni tête, Titanic II est un kamoulox merveilleux se moquant allègrement du film éponyme et du genre du walking simulator. Le jeu emporte l’audience joueuse de saynète en saynète, partant de la chute du corps de Jake, jusqu’à un musée, en passant par l’exploration des fonds marins. Vainqueur du festival A MAZE 2023, le jeu est suffisamment fantastique pour alterner entre humour et genre horrifique. Le jeu est en quelque sorte une métaphore de la mort, mais il convient également de ne pas pousser l’interprétation trop loin étant donné que le jeu se suffit à lui-même sans trop d’explications… Et vraiment si besoin, Céline Dion fait effectivement partie de l’OST du jeu… pour ce qui est des explications.
Soul Hackers 2, Atlus, 2022
j’ai adoré le jeu, j’ai adoré ses personnages ! Je comprends les critiques sur son level design, mais finalement, j’ai aussi adoré le côté très… liminal des donjons ! La tour de l’espoir m’a rappelé certains donjons de SMT 3 et ses longs couloirs sans aucune fenêtre ! Au final, j’étais étrangement à l’aise dans l’inconfort généré par les donjons. Vraiment, tout était bien et cela m’a permis de patienter tranquillement avant P3R ! (en attendant, j’ai essayé SMT 1 sur snes et bon… ça va être clairement plus compliqué de rentrer dedans…)
Celeste 64, Celeste Team, 2024
Celeste 64, présenté comme un jeu de jam, célèbre le 6e anniversaire du jeu originel. Si les contrôles peuvent être difficiles à appréhender au début, notamment pour ce qui est de la navigation dans l’espace et repérer l’atterrissage suite à un saut, ils deviennent vraiment plaisants au fur et à mesure de l’aventure. Cette dernière est relativement limitée, mais permet de retrouver des personnages auxquels on s’est attaché : Badeline, Theo et Granny. Si le dialogue avec Badeline fait implicitement référence à la transition de genre de Maddy Thorson (partages d’inquiétude, autopersuasion, etc.), ceux avec Theo et Granny évoquent davantage le quotidien de Madeline après avoir gravi pour la première fois la montagne. Un excellent jeu pour se remémorer le jeu originel. Certaines lignes font d’ailleurs référence à la nostalgie en mentionnant la transition esthétique du jeu, de la 2D à la 3D.
Sonic CD, Sonic Team, 2023
Sonic CD est techniquement le second opus de la série sortie sur Megadrive. Contrairement au reste des épisodes sortis sur la même console, celui-ci n’a pas été développé par l’équipe principale et cela se ressent grandement dans son Game design et son level design. On retrouve Sonic en train de lutter contre les plans machiavéliques de Robotnik. Ce dernier venait tout juste d’accaparer une planète qu’il accrocha à celle du hérisson. Il n’y a pas grand-chose d’autre à dire sur ce jeu tant il s’inscrit tout de même dans la continuité du précédent, son Gimmick qui est de faire voyager Sonic dans le temps n’est finalement pas si bien employé tant le Level design, reste relativement similaire entre les périodes explorées. Une fois le jeu maîtrisé, il devient enfin plaisant à parcourir, en particulier, dans sa version anniversaire, publiée dans la compilation « Sonic origins ». En effet, ayant la possibilité de choisir d’autres personnages pour parcourir les niveaux de Sonic CD, ces derniers deviennent bien plus faciles à naviguer. C’est à ce moment-là que l’on s’aperçoit du fait que l’expérience est relativement courte tout de même. Peut-être que l’élément majeur qui vient tant frustrer l’expérience du jeu est le fait que le Level design empêche régulièrement l’audience joueuse de prendre de la vitesse. Des bumpers et autres ressorts sont utilisés de sorte qu’il est toujours difficile d’aller vite et c’est dommage.
Dans une certaine mesure, la qualité générale du titre est un artefact des conditions de travail probablement très difficiles qui furent imposées à l’équipe en charge de ce projet.
Individualism in the Dead-Internet Age, Nathalie Lawhead, 2024
Une expérience passionnante qui nous propose de redécouvrir beaucoup sur l’Internet des origines et de l’industrie oppressante que c’est devenu aujourd’hui. Il est très difficile de parler de ce jeu dans le sens où la densité de son contenu nécessite bien plus que quelques lignes. Il s’agit d’un essai et d’un manifeste à l’égard de la façon dont l’autrice constate l’évolution de l’Internet et des pratiques de ses usagers. Sans verser non plus dans une nostalgie mélancolique, le jeu/essai de Nathalie Lawhead oppose un Internet qui s’est développé par des pratiques libertaires (hack, bidouilles, etc.) et l’Internet domestiqué par les superstructures que sont les plateformes comme les réseaux sociaux principaux.
Caravan Sandwitch, Plane Toast, 2024
Caravan sandwitch est un jeu créé par Plane Toast et publié par Dear Villager. Nous y incarnons Sauge, une jeune pilote qui revient sur sa planète natale à la recherche de sa sœur supposée décédée. Le jeu propose l’exploration d’un monde ouvert signifiant la planète de Cigalo, anciennement marécageuse, mais dont le climat a été modifié artificiellement afin de faciliter son exploitation industrielle et capitalistique.
À de nombreux égards, Caravan Sandwitch reprend des thématiques bien connues de jeux qui le précèdent comme Death standing et Sable. En l’occurrence le jeu met en récit une vision postapocalyptique qui permet à son audience joueuse de faire l’expérience de ce que serait une fin du monde. Contrairement aux deux précédents, en revanche, Caravan Sandwitch développe davantage une vision qui s’inscrit dans le genre du Hope punk.
Les nombreuses quêtes nous permettent ensuite de découvrir le quotidien des derniers habitants de cette planète, mais également de comprendre le processus par lequel cette planète a fini par dépérir. Aucun ne doute là-dessus, la raison principale est bien sûr son exploitation par un groupe possédant à la fois les pouvoirs économiques et politiques, nommé le Consortium dans le jeu, qui après avoir fini l’exploitation rentable de cette planète a décidé de l’abandonner. Fondamentalement, le jeu s’inscrit dans une lecture anticapitalistique très probablement anarchiste tout en faisant également la promotion du slow Life, d’un ralentissement et d’un décentrement de l’être humain par rapport à la nature. En une dizaine d’heures, le jeu est en somme une très belle porte d’entrée à cette philosophie de vie clairement affichée par le studio qui l’a développé.