Le Crypto Art est un mouvement artistique récent dans lequel les artistes produisent des œuvres qui vont ensuite être distribuées par des crypto art galeries tout en s’appuyant sur une technologie blokchain. Une blockchain est une technologie de transmission d’informations dont la distribution est gérée de pairs-à-pairs. Autrement dit, il s’agit en somme d’une base de données dont les informations sont partagées au sein d’un réseau et validées directement par les utilisateurs et utilisatrices de ce réseau. Sécurisées cryptographiquement, les blockchains permettent d’offrir une alternative décentralisée à de nombreux systèmes d’informations.
Bien que la présentation de ce qu’est une blockchain soit simpliste ici, cela permet tout de même de comprendre les enjeux liés au crypto art. Une œuvre fait partie d’une blockchain lorsqu’elle est tokenisée, c’est-à-dire qu’elle a suivi un processus par lequel un set de donnée est défini par une suite de caractères randomisés. Chaque œuvre est donc associée à un seul et unique token sur une blockchain. L’intérêt de ce procédé est d’assurer une certaine rareté à l’œuvre, rareté qui est reconnue par le réseau (Finucane, 2018)[1]. Si pour une image, il n’y a qu’un seul et unique token, alors cela revient à la considérer comme étant la seule et unique véritable image et donc en somme, la seule à avoir une véritable valeur. En réalité, plus que l’image (qui peut être téléchargée, réuploadée, etc.) en tant que telle, c’est le titre de propriété qui a une valeur.
Autrement dit, pour ce qui est du marché de l’art, à l’heure de son immatérialité, les blockchains sont cruciales puisqu’elles contredisent la reproductibilité infinie, pour citer Walter Benjamin, et rendue possible par la dématérialisation de l’art (Lippard, Chandler, 1967)[2]. Par le processus de tokenisation, il est possible d’imposer une rareté dans un espace numérique et donc techniquement reproductible à l’infini. Par ailleurs, les utilisateurs et utilisatrices, pour gérer leurs possession, possèdent des wallets dans lesquels se trouvent leur token. Cela donne un caractère d’hyper-portabilité selon Franceshet et al (2019)[3]. De fait, le crypto art est particulièrement une affaire économique puisque les tokens sont comme des titres de propriété qui s’échangent sur un marché secondaire, le tout soutenu par une blockchain.
De plus en plus de ponts se tissent entre le monde du jeu vidéo et les technologies Blockchain. L’un des exemples les plus probants est CryptoKitties, une plateforme vidéoludique de collection et de reproduction de chats présentés comme uniques puisque le service et les utilisateur·ice·s passent par la blockchain Ethereum pour pouvoir échanger ces NFTs dont les plus chers sont estimés à plus de 1,5 millions d’euros (999 ETH). Au-delà d’un simple outil facilitant la collection, les blockchains peuvent représenter un enjeu pour le partage des données entre les joueur·euse·s d’un même jeu et pour le game design en général. Cet article vient donc situer depuis une perspective critique les enjeux de l’usage des blockchains et du crypto art dans le game design des jeux vidéo.
Citation conseillée pour cet article :
Grine, E., (2021). Quels enjeux vidéoludiques pour les blockchains . Les Chroniques Vidéoludiques. URL : https://www.chroniquesvideoludiques.com/quels-enjeux-videoludiques-pour-les-blockchains/