La Bulletin de Janvier 2017 de la Revue LCV

Témoignages d’Amours et de Raisons – Bulletin

Vous souhaitez rédiger un bulletin pour LCV ? Rien de plus simple ! Tout le monde peut le faire. Il suffit de trouver un thème sur lequel vous allez choisir entre 4 et 6 vidéos et pour lesquelles vous devez écrire un court paragraphe. Merci de contacter @EstebanGrine pour l’organisation, la planification, etc.

 

Ah, janvier, premier mois de l’année et tu nous amènes déjà des productions et des vidéos instaurant un nouveau standard. Surtout, Janvier, c’est l’occasion de parler avec son coeur, avant que la raison ne nous rattrape, serait-ce déjà trop tard ? Probablement. Alors, pour ce premier bul-le-tin, la revue propose de découvrir des créateurices (et leurs vidéos) ayant réalisé des témoignages d’Amour et de Raisons au Jeu Vidéo. Et surtout, c’est l’occasion d’interroger. D’interroger sur la façon dont on tient des discours sur les jeux vidéo. Comment sont-ils ? Comment les critiques analysent les jeux auxquels iels jouent ? Faut-il recontextualiser ou détacher une œuvre du corpus de l’auteur ? Avec cette sélection, LCV apporte des éléments de réflexions. Jamais de réponses absolues : la re-la-ti-vi-té.

Comment créer du discours sur le Jeu Vidéo – Dial Up

Cela commence avec Pier-re et Damastès, deux créateurs aux chaines youtube extraordinaires qui nous proposent un nouveau format : un dialogues par messages vocaux interposés. C’est brillant, sincère et plus de douceur pour le Jeu Vidéo. De plus, ils mettent le doigts sur de nombreux concepts de manière totalement claire, intelligible et convaincante. Comment analyse-t-on ? Pour Damastès, cela part d’une opinion personnelle, quelque chose qui vient du coeur. Non pas que cela soit la bonne façon, mais plutôt que c’est celle qu’il considère le plus.

Sonic 1er – Pier-re

La seconde vidéo, c’est une Madeleine. Pier-re, en solo, cette fois, nous parle de Sonic 1, le tout premier, sur Megadrive. Il a bien raison sur de nombreux points, Sonic dépasse le raisonnement logique. C’est un souvenir heureux en chacun de nous qui dépasse toutes rationalités. Pier-re n’a pas de message. Il ne vous dit pas : « oui, blah blah blah, Sonic, c’est un héros, c’est une icône blah blah ». Ses propos dépassent la Raison pour ne se concentrer que sur le Hic et le Nunc : l’instant présent qui reste dans notre mémoire. C’est pertinent, c’est convaincant : son discours dépasse la Méthode pour se concentrer sur un ressenti, un amour éternel dédié au hérisson.

L’éternelle fin des Temps – ArmulhTeam X Ikakura

La Méthode, c’est ce qui caractérise les vidéos de l’ArmulhTeam et dont la dernière, présente dans ce bulletin, a été réalisée par Ikakura et Cramulh. Nous avons là une construction cartésienne, suivant une logique bien huilée et caractéristique des productions de ces créateurs. Ici, le Jeu, son message, est absolu. Peu importe le profil du joueur, le message transmis est le même. La production de cette équipe est remarquable pour plusieurs points paradoxaux. La logique cartésienne du propos est fortement contrasté par la forme de la vidéo qui nous installe dans une ambiance propice à nous convaincre.

Regard Détourné

Tifor propose lui-aussi une expérience similaire et se concentre sur ce que lui évoque les masques présents dans Majora. Il construit sa pensée à partir d’un jeu pour questionner philosophiquement l’individu, son essence, son être et son identité. Comment comprendre « le masque » ? Est-il le reflet de notre identité ? N’est-ce qu’une façade pour nous protéger de l’inconnu ? Ce témoignage privilégie un rythme lent : c’est l’atmosphère qui prime et qui nous installe dans une disposition mélancolique mais attentive.

Contradictions épistémologiques

Vient enfin les toutes deux excellentes vidéos de Pseudoless et Olbius, chacun ayant analysé le jeu « The Last Guardian ». Pourquoi avoir choisi ces deux vidéos ?  Ce qui me frappa en regardant chacune d’elles, c’est qu’ils ont tous les deux raison. Pourquoi ? Serait-ce uniquement moi qui ne sait pas choisir ? Non, nous avons là de manière frappante deux choix épistémologiquement différents pour construire deux réflexions différentes, opposées et pertinentes. Ce qui m’intéressa dans le témoignage d’Olbius, c’est son choix de ne pas trop recontextualiser l’œuvre de Fumito Ueda dans dans sa ludographie. Il propose ainsi une vision plus proche et sensible, libre de toutes attaches. Or, c’est précisément ce qui me passionna chez Pseudoless qui accorde la moitié de sa vidéo à « Ico » et « Shadow Of The Colossus », retraçant avec brio l’évolution du-dit Game Designer . En regardant ces deux vidéos, j’ai personnellement appris quelque chose : il existe de nombreuses méthodes d’analyses des jeux vidéo, parfois extrêmement codifiées comme les Tests et parfois très libres comme les critiques. Le Choix de rejouer ou de ne pas rejouer aux précédents jeux du même auteur permet d’avoir des visions différentes d’un même jeu, ce qui nous amène peut-être, j’ose le croire, à une réflexion plus objective lorsque l’on en fait la synthèse.
          

Ouverture

Les auteurs que nous avons présentés se placent dans une vision procéduraliste de l’analyse des jeux vidéo. C’est-à-dire qu’iels supposent que les jeux vidéo diffusent des messages (par leur mécaniques notamment) et qu’iels ont compris ces messages. En proposant leurs productions, iels militent pour leurs compréhensions des jeux qu’ils affectionnent ou pas. Nous remarquons que ces compréhension peuvent parfois être contradictoire. Alors, l’opposition de ces visions nous amène à considérer ces mêmes messages comme étant présents ou non, énonçant quelque chose pour l’un et son contraire pour l’autre. Ce que je pense avoir montré dans ce bulletin, c’est que les discours qu’iels tiennent sont de formidables témoignages des expériences vidéoludiques et qu’il est nécessaire d’en voir le plus possible pour comprendre ces objets. ■

Esteban Grine, 2017.